Annals of Burns and Fire Disasters - vol. XI - n. 3 - September 1998

COMPRENDRE ET RECONNAITRE LES MANIFESTATIONS DOULOUREUSES POUR MIEUX LES SOIGNER

Fonrouge J.M.,* Branche R,* Lakdja F.**

* Centre de Traitement des Brûlés, Service Pr. Paul Petit, Centre Hospitalier Universitaire Edouard Herriot, Lyon, France
** Institut Bergonié, Bordeaux


SUMMARY. Cet article considère la douleur, ou "les douleurs", comme disent les auteurs, pour mieux les soigner. Après avoir défini la douleur ils expliquent l'importance du critère des différentes douleurs. Ils considèrent aussi la perception de la douleur, qui est vécue de façon différente en fonction de plusieurs paramètres. Il y a deux priorités pratiques face à un syndrome douloureux aigu: la sédation de l'anxiété et la sédation de la douleur et il faut choisir l'anxiolytique et l'antalgique les plus appropriés. Après avoir décrit l'hierarchie de prescription les antalgiques en fonction du niveau de douleur, les Auteurs illustrent les protocoles de traitements des différents types de douleurs. En conclusion, ils indiquent des règles et des manières de prévention des effets secondaires et de sécurité.

Introduction: les douleurs

Dans la prise en charge des blessés et des malades, la médecine a effectué des progrès considérables sur les plans diagnostique et technique. Pourtant, même à la fin du XX siècle, les patients se plaignent de souffrir et craignent les soins à cause de leur contexte fréquemment douloureux.
La connaissance des mécanismes douloureux, des systèmes de contrôle et des voies spécifiques empruntées pour permettre le cheminement de l'information douloureuse sont des découvertes récentes. Dans cet article, les Auteurs essayent de présenter les bases théoriques, pharmacologiques et thérapeutiques nécessaires pour permettre de mieux comprendre et traiter les actes douloureux dans le cadre des soins dispensés aux patients brûlés.
"La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire existante ou potentielle ou décrite en termes d'une telle lésion."
Ces dernières années ont apporté des progrès significatifs dans l'analyse, la prise en charge et les soins des patients douloureux.
Plusieurs notions ont été précisées ou modifiées et parmi elles:

  • l'identification des différents types de douleur
  • le trajet et les zones d'intégration' de la douleur
  • la découverte des morphinornimétiques endogènes: enképhalines,' endorphines
  • le site d'action des thérapeutiques
  • la découverte des récepteurs aux opiacés

De plus, des découvertes pharmacocinétiques ont permis la synthèse de substances de plus en plus adaptées et efficaces.

Pourquoi etudier le mot "douleurs" au pluriel

Premier critère d 'importance, "la" douleur n'existe pas, comme le mot "la jaunisse" a disparu pour parler aujourd'hui des hépatites (alcooliques, toxiques, virales, auto-immunes). Il en est de même pour "la" fièvre: ce sont des appellations dépassées.
Les différents types de douleurs sont identifiés avec des traitements spécifiques, efficaces ou non, selon le type de douleur.
Face à un symptôme douloureux, il faut ainsi reconnaiÎtre, parmi les différents types de douleurs, quel est le processus douloureux en cause:
Une symptomatologie douloureuse peut être liée à trois étiologies différentes. Ce sont les douleurs:

  • par excès de nociception
  • processus lésionnel (atteinte des tissus)
  • inflammatoire
  • ischernique
  • mécanique (fracture, distension viscérale, étirement de ligaments, muscles)

Ces douleurs sont caractérisées par la perception de piqûres, de brûlures, de broiement, d'élancement dans un foyer de fracture, d'une plaie ou d'une lésion. La douleur peut être sourde, exquise (foyer de fracture), extrêmement précise ou à distance (cas des douleurs référées).

  • neuropathiques (désafférentation) (au niveau du système nerveux périphérique)
  • lésions des plexus
  • neuropathies périphériques
  • douleurs post-zostériennes
  • causalgie' et algodystrophie ou dystrophie sympathique réflexe
  • section de nerf, amputation: douleur du membre fantôme
  • compression de nerf (au niveau du S.N.C.)
  • A.V.C. thalamiques ou sous-thalamiques suite à lésions médullaires traumatiques (paraplégie)

Ces douleurs sont perçues comme des sensations de brûlures, d'arrachement, de coup de poignard, de décharges électriques, progressant comme un éclair parcourant le membre depuis sa racine. L'examen clinique met en évidence des zones d'hypoesthésie voire d'anesthésie ou, au contraire, une hyperesthésie voire une allodynie (sensation insupportable du contact du drap ou d'un vêtement sur la lésion), une allochesthésie... Localement, on constate fréquemment des troubles trophiques ou vasomoteurs. Ces douleurs interviennent dans un fond douloureux permanent. Elles surviennent habituellement à distance de l'événement causal (environ un an après dans 24% des cas"). Dans ce cadre nosologique entrent les perceptions douloureuses situées dans un segment de membre qui a été amputé (douleur du membre fantôme).

  • psychosociologique
  • dépression
  • névrose (anxieuse, hystérique)
  • psychotique délirant

Ces différentes douleurs ont des traitements parfois très spécifiques. Une thérapeutique standard peut donc conduire à une inefficacité voire une erreur thérapeutique. D'autre part, un patient peut présenter plusieurs syndromes douloureux associes, par exemple: une douleur inflammatoire + une douleur de désafférentation + une douleur de type ischémique. Il faudra, dans ce cas, associer plusieurs thérapeutiques spécifiques.

La perception de la douleur

  • l'information donnée au patient (lorsque c'est possible) avant l'acte douloureux
  • le seuil de perception de la douleur (propre à chaque patient)
  • le contexte psychologique du patient: anxiété, dépression, stress, etc.

Le stress est l'une des composantes cliniques essentielles présentées par les patients à la phase initiale d'une pathologie douloureuse. Ce stress majore la perception de la douleur en modifiant la façon dont elle est perçue, contrôlée, intégrée. Un stress important peut transformer une douleur modérée en une authentique souffrance.
La souffrance, c'est l'intégration négative et néfaste de la douleur. Un patient souffre moins s'il connaît la durée, l'intensité et parfois la topographie de sa douleur. Il appartient donc au praticien d'évaluer la façon dont le patient perçoit le phénomène algique.
Il apparait que cette perception peut être aussi directement liée au vécu douloureux du patient (et parfois de son entourage proche) mais aussi en fonction de la projection qu'il se fait du devenir de sa pathologie:

  • mise en jeu du pronostic vital (infarctus, polytraumatisé)
  • atteinte de l'image corporelle (trauma facial, section de membre)
  • notion de décès d'un proche dans le même accident ou de responsabilité du décès d'un tiers
  • sensation d'avoir échappé à la mort (sauvetage ou chance "miraculeuse")

Le comportement du médecin ou des soignants a beaucoup d'importance. Le patient doit être informé sur son état "avec tact et mesure". Si les soignants s'affairent, sans explications, autour du patient, celui-ci peut craindre le pire et présenter des manifestations vagales qui vont aggraver son état clinique.
Un autre élément est intriqué au phénomène douloureux, c'est l'état physique et le niveau de fatigue physique et psychique.
La perception de la douleur comme une souffrance est donc plurifactori elle:

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Ces différents facteurs devraient être évalués et leur appréciation devraient d'être inscrite dans le dossier du malade.

Priorités pratiques face à un syndrome douloureux aigu

Face à un patient douloureux (adulte ou enfant), deux priorités s'imposent:

  • la sédation de l'anxiété
  • la sédation de la douleur

Parfois, la sédation de la douleur peut suffire pour calmer le patient, mais - s'il faut poursuivre des soins -l'anxiolyse est nécessaire.
A. Choix de l'anxiolytique (Tableau I)
L'anxiolytique de choix est le midazolam (Hypnovel)

- son début d'action est très rapide, sa durée d'action est très courte, son élimination est rapide. De plus, il offre la possibilité d'être injectable en IV, IM, ss-cut, IR chez l'enfant.
Ces médicaments, per os, offrent une anxiolyse d'action plus rapide lorsqu'ils sont administrés par voie sublinguale (action en 2 à 3 minutes).

Produit

Dose

Début /
Durée d'action

Avantages

Inconvénients

Hypnovel
Midazolam
IV/IR

0,05-0,1 mg/kg

0,5-2 min
-

Sécurité
Rapidité
d'élimination

Risque de
dépression
respiratoire

Valium IV/IR
Diazépam
Xanax

0,1-0,2 mg/kg

0,5-1,5 min
-

lère BZD

Trop longue
durée d'action

Alprazolam
Per os / sub-L

0,01 mg/kg

10-120 min
-

8 h

Action rapide

Trop longue durée d'action

Atarax
Hydroxyzine

IVIper os (sirop)

1 mg/kg-,/j

15 min
-

6-8 h

Action neurovégétative

Excitation transitoire

Tableau 1 - Médicaments

B. Choix de l'antalgique (Tableau II) Plusieurs substances antalgiques sont proposées pour leur action antalgique.
Elles appartiennent à des classes pharmacologiques différentes avec des pouvoirs antalgiques spécifiques. En effet, le traitement d'une douleur par excès de nociception est totalement différent du traitement d'une douleur neuropathique.
Les douleurs aiguës sont, presque exclusivement, des douleurs par excès de nociception. De récents travaux montrent toutefois que les brûlés et les polytraumatisés peuvent présenter des douleurs neuropathiques aiguës.

On définit aujourd'hui trois classes d'antalgiques:

  • les antalgiques périphériques (paracétamol, salicylés, AINS ... )
  • les morphiniques et morphino-mimétiques
  • les antidépresseurs tricycliques, anticonvulsivants, neuroleptiques...

La kétamine appartient à un registre tout à fait à part avec des indications très spécifiques. Il en est de même pour l'utilisation du protoxyde d'azote.
L'administration d'une morphine ou d'un morphinornimétique nécessite la prescription d'une dose adéquate. Ce dosage est d'autant plus important qu'avec ces thérapeutiques le surdosage est responsable d'une dépression respiratoire.
son début d'action est très rapide, sa durée d'action est très courte, son élimination est rapide. De plus, il offre la possibilité d'être injectable en IV, IM, ss-cut, IR chez l'enfant.
La technique du titrage est souhaitable lors de l'emploi des produits morphiniques et morphinornimétiques. La variation de sensibilité est grande en fonction des patients. Les doses peuvent s'étager de 5 à 200 mg.
Si l'administration se fait par voie orale, les morphines LP (Skénan@ ou Moscontin@) sont prescrites à la dose initiale, chez l'adulte, de 60 mg par jour en deux fois 30 mg. Par la suite, si la douleur persiste, on adaptera en augmentant chaque jour de 50% les nouvelles prises mais en respectant toujours un intervalle de 12 h pour cent de la dose de titration seront réinjectés si nécessaire au cours de l'acte si celui-ci dure plus de 20 min.

Produit

Dose

Début /
Durée
d'action

Puissance

Avantages

Inconvénients

Paracétamol
Per os / IV / IR

3 g/j (adulte)
60 mg/kg
chez l'enfant

< 2 h
-
4 à 6 h

aspirine

antalgique de
première
intention

attention chez
l'insuffisant
hépatique

Profénid@
Kétoproféne
Per os / IV / IR

Adulte
200 à 300 mg/j

45 à 90 min
-
> 4 h

Classe 1
O.M.S.

action
antalgique
propre

AINS
CI chez
l'ulcéreux

Di-Antalvic@
Dextropropoxyphène
+ Paracétamol
Per os / IR

Adulte slt
4 à 6 gel/j
maxi

30 à 60 min
-
4 à 6 h

Classe 2
O.M.S.

antalgique
mixte

nausées
vomissements
Pfs
dépression
respiratoire

Nubain@
Nalbuphine
IV/IM/ss-cut

Adulte = 20 mg
Maxi = 160 mg/j
Enfant >18 mois
0,2 mg/kg/6h

30 min
3-6 heures

Classe 3
O.M.S.
Morphine

moins
nauséeux
que le
Temgésicg

dépression
respiratoire
réversible
par Narcan@

Temgesic@
Buprénorphine
IV et sublingual

Adulte:
1 à 2 cp x3/j
Enfant:
6 p g/kg/j

10-30min
8 h

2 cp = 10 mg
de morphine

voie
sublinguale

vertiges
somnolence
nausées
vomissements

Morphine
Per os / sub-L
IV/IM/ss-cut

Titrage
Dose initiale
60 mg/j Adulte

30 min
4 à 5 h

Valeur
de
référence

très maniable

dysphorie
rétention
urinaire

Skenan@/
Moscontin@
Sulfate de morphine

Titrage
même dose
toutes les 12 h

Début > 2 h 30
-
12 h

Morphine

TTT
douleurs
chroniques

hallucinations
dépression
respiratoire

Rapifen@ IV
Alfentanil

<7-IOpg/kg

1 min
10-15
min

Fentanyl/7

rapidité
d'action = l'

 

FentanyL@ IV
Fentanyl

2 p g/kg

1-3 min
-

50 à 100 M

très puissant

dépression
respiratoire

Tableau II - Les différents antalgiques

Chez la personne fragile ou âgée, il est préconisé de débuter par des doses de 20 mg x 2/jour, voire 10 mg x 2/jour.
Lors de l'injection d'un morphinornimétique comme l'alfentanil, les doses de titration sont de 10 pg/kg-' min` jusqu'à l'obtention d'une analgésie de bonne qualité.
Le total des bolus constitue la dose d'induction: elle est d'environ 250 pg` pour une personne de 65 kg. Cinquante
Dans les douleurs aiguës (postopératoires), la morphine et les morphinornimétiques peuvent être injectés de façon auto-contrôlée à l'aide d'une pompe qui délivre un débit continu et/ou des bolus pré-réglés. C'est la P.C.A. (patientcontrolled analgesia).
La kétamine est un produit anesthésique" qui dispose, à la dose de 1 mg/kg `en IV ou 3 mg/kg-'en IM, d'une fonction analgésique associée avec un état neurologique d'indifférence.
Le mélange oxygène-protoxyde d'axote 50/50" est aussi un analgésique efficace mais qui nécessite une bonne coopération du malade lors de son emploi avec la valve de Robertshaw. Le temps d'induction est de 3 à 4 minutes. Il peut être administré par des lunettes nasales - le temps d'induction est alors plus long. Mélangé à 50% avec de l'oxygène, il entrame une somnolence, une amnésie et une analgésie complète.

Hierarchie de prescription des antalgiques en fonction du niveau de douleur

L'O.M.S. a défini les modalités thérapeutiques concernant les douleurs aiguës par excès de nociception. Dans ses recommandations, l'O.M.S. précise différents "paliers thérapeutiques" présentés sous la forme d'une pyramide (Tableau III).

Tableau III - Paliers thérapeutiques Tableau III - Paliers thérapeutiques

Le choix de la stratégie antalgique est ainsi lié à plusieurs paramètres (Tableau IV-XII):

  • le type de douleur (excès de nociception, neuropathique, psychosociale)
  • le mode d'évolution de la douleur: aiguë ou chronique
  • le niveau de médicalisation du patient (perfusé ou non)
  • le niveau de stabilité la douleur: stable ou avec des actes itératifs douloureux

Indications

Antalgiques
peripheriques

Morphiniques

Antidépresseurs
tricycliques

Céphalées/migraines

+

-

+

Douleurs viscérales

+

+

-

Douleurs post-op.

+

+

-

Amputation

+/-

-

+

Plexus brachial

+/-

-

+

Section nerveuse

+/-

-

+

Zona

+/-

-

+

Neuropathie A

+/-

-

+

Névralgie du 111

+/-

-

+

Cancer

+/-

+

+

D. rhumatismales

+

-

+

SD algodystrophie

+/-

-

+

SD post-commotionnel

+/-

-

+

D'après: M. Couturier: La douleur: place des antalgiques

Tableau IV - Types de traitement des douleurs selon leur nature

Tableau V - Le type de douleur Tableau VI - La douleur aiguë
Tableau V - Le type de douleur Tableau VI - La douleur aiguë
Tableau VII - Douleur de désafférentation Tableau VIII - Le mode de survenue ou le contexte de la douleur. La douleur post-opératoire
Tableau VII - Douleur de désafférentation Tableau VIII - Le mode de survenue ou le contexte de la douleur. La douleur post-opératoire

En post-opératoire immédiat:
Injecter du Rapifen IV en bolus de 10 gamma/kg-1/min-1
jusqu'à obtenir une sédation de la douleur
Cotation toutes les 15 min (échelle verbale)
de l'apparition de la douleur

 

Dans les 24/48 h post-opératoires

Chez l'adulte
Morphine: 50 mg/50 ml
Dose d'attaque: 0,1 mg/kg
0,05 mg/kg-1 si > 60 ans
0,025 mg/kg-1 si > 80 ans
Dose d'entretien: 0,05 meg-1/h-1
0,025 mg/kg-1/h-1 si > 60 ans
0,0125 mg/kg-1 /h-1 si > 80 ans
Si cotation verbale > 3 = bolus égal à la dose horaire

Chez l'enfant
Morphine: 50 mg / 50 ml
Dose d'attaque: 0,1 mg/kg-1
Dose d'entretien: 0,05 mg/kg-1/h-1
0,025 mg/kg-1/h-1 si < 3 ans
0,0175 mg/kg-1/h-1 si < 3 mois
si insuffisant augmenter la dose de horaire de 50%

Tableau IX - Douleurs post-opératoires. Protocoles antalgiques en situation de soins

Tableau X - Les douleurs continues ou douleurs chroniques

Tableau X - Les douleurs continues ou douleurs chroniques

Chez un patient perfusé

Chez l'adulte
Morphine: 50 mg/50 ml
Dose d'attaque: 0,1 mg/kg
0,05 mg/kg-1 si > 60 ans
0,025 mg/kg-1 si > 80 ans
Dose d'entretien: 0,05 mg.kg-1 h-1
0,025 mg/kg-1 h-1 si > 60 ans
0,0125 mg/kg-1 h-1si > 80 ans
Si cotation verbale > 3 = bolus égal à la dose horaire

Chez l'enfant
Morphine: 50 mg/50 ml
Dose d'attaque: 0J mg/kg-1
Dose d'entretien: 0,05 mg/kg-1 h-1
0,025 mg/kg-1 h-1 si < 3 ans
0,0175 mg/kg-1 h-1 si < 3 mois
si insuffisant augmenter la dose de horaire de 50%

 

Chez un patient non perfusé
traitement par voie orale

Chez l'adulte
Morphine buvable à 10% (l mg/ml)
ou
Skénan - Moscontin
Débuter par 30 mg x 2/jour
2 > 60 ans
3 > 80 ans
Adapter en fonction des effets après 24 h
Evaluation de la douleur matin/midi/soir

Chez l'enfant
Morphine buvable à 10% (l mg/ml)
ou
Skénan - Moscontin
Possibilité d'ouvrir la gélule de Skénan
2 < 3 ans
3 < 3 mois
Adapter en fonction des effets après 24 W2

Tableau XI - Douleurs du brûlé en phase aiguë

Pansement douloureux:

JI-J2
Vérification de greffes
Nécessité d'une voie veineuse

Chez l'adulte
Rapifen
10 gamma/kg
5 gamma/kg-1si > 60 ans
2 gamma/kg-1si > 80 ans
à répéter toutes les minutes jusqu'à l'obtention
d'une analgésie suffisante
Total des bolus = Dose d'induction
si acte > 20 mm.: possibilité de réinjection de 50% de la dose
Pansement suivant: injecter la dose en un seul bolus

Chez l'enfant
préparer la peau avec la crême EMLA
Rapifen dilué à 100 gamma/ml
10 gamma/kg-1
5 gamma/kg-1 si < 3 ans
2 gamma/kg-1 si < 3 mois
à répéter toutes les minutes jusqu'à l'obtention
d'une analgésie suffisante
Total des bolus = Dose d'induction
si acte > 20 min.: possibilité de réinjection de 50% de la dose
Evaluation de la douleur avec l'échelle CHEOPS
Pansement suivant: injecter la dose en un seul bolus

Tableau XII - Douleurs pour pansements

Protocoles de traitements des différents types de douleurs

  • Une douleur par excès de nociception relève d'une stratégie définie par l'O.M.S.

Dans les douleurs aiguës, le choix thérapeutique sera guidé en fonction du niveau de médicalisation et de la stabilité ou non de la douleur.

  • La douleur de désafférentation nécessite un traitement specifique dont l'algorithme est défini par l'Internal Association for the Study of Pain (I.A.S.P.).

La une douleur majorée par l'anxiété ou une dépression demande:

  • une prise en charge pluridisciplinaire:
  • écoute de la part du soignant
  • prescription d'un anxiolytique voire d'un antidépresseur
  • entretien avec un psychologue voire un psychiatre en fonction de l'intensité de la composante dépressive

Il faut poursuivre le traitement de fond instauré pour la douleur (morphine retard par exemple) et prévoir une antalgie spécifique pour l'acte douloureux.
Il est possible de prendre le relais du traitement parentéral par un traitement per os lorsque les soins sont peu douloureux. Dans ce cas, le protocole ci-dessous peut être proposé (Tableau XIII).

Relais du traitement parentéral et indications précédentes

Chez l'adulte
Morphine buvable 10%: 1 mg/ml
0,5 mg/kg-1
0,25 mg/kg-1 si > 60 ans
Donner la morphine 1 h 30 min avant le pansement
Si insuffisant: poser une voie veineuse
et application du protocole Rapifen

Chez l'enfant
Morphine buvable 1 mg/ml
(diluée avec du sirop de fraise)
0,5 mg/kg-1
0,25 mg/kg-1 si < 3 ans
0,15 mg/kg-1 si < 3 mois
Donner la morphine 1 h 30 min avant le début du pansement
Evaluation de la douleur avec l'échelle CHEOPS
si < 7 idem pour pansement suivant
si > 7 augmenter les doses de 50%?

Tableau XIII - Analgésie par voie orale

Prévention des effets sécondaires et règles de sécurité

Les traitements morphiniques (Morphine, Rapifen, Fentanyl ... ) doivent être réalisés dans un environnement de soins comprenant à proximité immédiate du patient:

  • de l'oxygène
  • un ballon de ventilation
  • une canule de Guedel
  • une ampoule de Narcan

Le patient doit être monitorisé si possible avec un saturomètre de pouls.
Ces produits présentent plusieurs risques secondaires comme:

  • des nausées et des vomissements mais qui sont transitoires
  • une constipation qui est constante et nécessite la

prescription systématique de:

  • Importal
  • Débridat
  • Lansoyl
  • ou suppositoire à la glycérine
  • dépression respiratoire précédée ou non d'une somnolence.

Il faut noter que le risque de dépression respiratoire (Tableau XIV) est présent seulement dans les cinq premières minutes après l'injection de Rapifen alors qu'il peut à l'inverse se produire plusieurs heures après l'injection de morphine ou l'absorption d'une morphine retard.
Ces traitements sont réalisés sur prescription d'un anesthésiste réanimateur qui doit être présent et capable d'intervenir à tout moment.

Conduite à tenir face à une dépression respiratoire on une somnolence brutale sous morphinique
Ventiler le patient avec le ballon autoremplisseur et faites appeler le médecin réanimateur

En prévention:

  1. Avoir toujours à proximité
  • une ampoule de Narcan (naloxone) un ballon de ventilation autoremplisseur (Laerdal ou Ambu)
  1. Surveiller la fréquence respiratoire (FR) pendant l'administration du morphinornimétique
  • si la FR est < 10 =* arrêt de l'injection au PSE la réapparition de la douleur, reprendre le PSE à demi-dose
  • si la FR est < 7 = arrêt du PSE + appel du réanimateur + préparer le Narcan Une ampoule = 0,4 mg dans 10 ml d'E.D.
  1. Si somnolence anormale: diminuer la vitesse du PSE de 50%

Tableau XIV - Dépression respiratoire

Evaluation d'une thérapeutique antalgique

Prescrire une thérapeutique antalgique n'est que la première partie de l'action de soins dûe à ces patients.
Le corollaire de cette prescription est l'évaluation de son efficacité. Celle-ci consiste en l'appréciation par le patient de son niveau de douleur et, lorsque le patient ne peut s'exprimer (nourrisson), en l'appréciation de critères reflétant l'efficacité de la thérapeutique.
Pour une équipe soignante, il faut trouver des critères ou des échelles d'évaluation qui soient à la fois fiables mais compatibles, sur le plan de la charge de travail, avec la gestion quotidienne d'un service.
Parmi les échelles proposées, il est souhaitable de retenir:

  • le Questionnaire Douleur de Saint Antoine (QDSA) pour sa capacité à identifier le type de douleur (Tableau XV)
  • l'autoévaluation par le patient (qui donne une notation de 1 à 10) sur son niveau de douleur
  • l'échelle visuelle analogique
  • l'échelle de CHEOPS pour les enfants (Tableau XVI)

Il est facilement acceptable d'inclure, pour les patients pouvant s'exprimer, une cotation par autoévaluation inscrite lors de chaque surveillance sur la feuille de soins.

Nom:

Prénom:

Date:

QDSA

  • Vous trouverez ci-dessous la liste des mots utilisés par certaines personnes pour définir la douleur.
  • Afin de préciser la douleur que vous ressentez en général, donnez une note à chaque mot selon le code suivant:

0 Absent

1 Faible
2 Modérée
3 Fort
4 Extrêment fort

Pas du tout

Un peu
ou Moyennement
Beaucoup
Extrêmement

  • Pour chaque classe de mots, entourez le mot le plus exact pour décrire votre douleur
A
Battements
Pulsations
Elancements
En éclairs
Décharges électriques
Coup de marteau

B
Rayonnante
Irradiante

C
Piqûre
Coupure
Pénétrante
Transperçante
Coup de poignard

D
Pincement
Serrement
Compression
Ecrasement
Broiement
En étau

 

E
Tiraillement
Etirement
Distension
Torsion
Arrachement

F
Chaleur
Brûlure

G
Froid
Glace

H
Picotements
Fourmillements
Démangeaisons

I
Engourdissement
Lourdeur
Sourde

J
Fatigante
Epuisante
Ereintante

 

K
Nauséeuse
Suffocante
Syncopale

L
Inquiétante
Oppressante
Angoissante

M
Harcelante
Obsédante
Cruelle
Torturante
Suppliciante

N
Gênante
Désagréable
Pénible
Insupportable

O
Enervante
Exaspérante
Horripilante

P
Déprimante
Suicidaire

Tableau XV - Questionnaire douleur de Saint Antoine (QDSA)

Enfants de 1 à 5 ans: étude des six items

Items

Comportement

Score

Définition

Pleurs

Pas de pleurs
Gémissements
Pleurs
Cris perçants

1
2
2
3

Enfant ne pleure pas
Gémit, vocalise ou pleure silencieusement
Pleure modérément, pleurniche
Crie à pleins poumons, sanglots

Visage

Calme
Grimace
Sourire

1
2
0

Expression faciale neutre
A coter seulement si face neutre
A coter seulement si face positive

Verbalisation

Aucune
Plaintes diverses
Plaintes de douleur
Plaintes mixtes
Positive

1
1
2
2
0

L'enfant ne parle pas
Se plaint en appelant sa mère, soif
Se plaint de douleur
Se plaint de douleur + "maman" ou soif
Remarque positive/parle d'autre chose

Torse

Neutre
Changement de position
Tendu
Frissonnement
Vertical
Contention

1
2
2
2
2
2

Tronc au repos
Corps en mouvement, change de position
Corps arqué ou rigide
Corps frissonne ou tremble
Enfant en position redressée
Le corps est attaché

Attouchement

Pas d'attouchement
Avance la main
Attouchement
Agrippement
Contention

1
2
2
2
2

Ne touche ni agrippe la plaie
Avance la main sans toucher la plaie
Touche doucement la plaie ou sa région
Agrippe sa plaie
Les bras de l'enfant sont attachés

Jambes

Neutre

Torsion/gigotement
Jambes levées/tendues
Debout
Contention

1

2
2
2
2

Jambes en positions diverses détendues
+ doux mouvements de reptation / brasse
mouvements des jambes/coups de pieds
Jambes tendues ou crispées sur le corps
En l'air, accroupissement, à genoux
Les jambes sont maintenues

La cotation maximale acceptable est égale à 7.
Au-dessus, il faut augmenter les doses d'antalgique ou modifier ceux-ci.

Tableau XVI - Echelle CHEOPS2 (échelle de douleur post-opératoire)

Conclusion

La prise en charge d'un patient douloureux est indiscutablement une démarche constante, attentive et contraignante.
Les patients n'ont pas toujours le souvenir des soins qu'ils ont reçus, ils ne sont parfois pas à même d'en mesurer la qualité. Par contre ils gardent le souvenir durable de la douleur perçue et non calmée.
La qualité de cette prise en charge nécessite de la part du soignant la volonté:

  • de rechercher et d'identifier le ou les phénomènes douloureux
  • de prescrire le ou les traitements spécifiques
  • d'évaluer leur efficacité
  • enfin, d'adapter voire modifier la thérapeutique prescrite

La cotation des résultats de cette évaluation rapi e (autoévaluation par le patient) sur la feuille de réanimatio ou de surveillance serait la preuve patente de la reconnaissance des manifestations douloureuses comme un signe clinique à part entière.
Seule cette reconnaissance permet une démarche thérapeutique qualifiée et efficace.

 

RESUME. This article considers pain, or, as the Authors say, "pains", in order to treat them better. After defining pain, they explain the importance of the creation of criteria of different pains. They also consider the perception of pain, which is experienced differently as a function of various parameters. There are two practical priorities to be faced in the presence of an accurate pain syndrome: the sedation of anxiety and the sedation of pain. It is also necessary to choose the most appropriate anxiolytic and antalgic agents. The Authors describe the hierarchy for the prescription of pain-killing drugs in relation to the degree of pain and illustrate treatment protocols for different types of pain. The Authors conclude with an indication of safety measures and ways of preventing side-effects.


BIBLIOGRAPHY

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This article was received on 12 December 1997.

Address correspondence to:
Dr Jean Marie Fonrouge
Centre de Traitement des Brûlés, Service Pr. Paul Petit
Centre Hospitalier Universitaire Edouard Herriot
69437 Lyon Cedex 03, France.

 

G. WHITAKER INTERNATIONAL BURNS PRIZE
PALERMO, ITALY

Under the patronage of the Authorities of the Sicilian Region for 1999

By law n. 57 of June 14th 1983 the Sicilian Regional Assembly authorized the President of the Region to grant the Giuseppe Whitaker Foundation, a non-profit-making organization under the patronage of the Accademia dei Lincei with seat in Palermo, an annual contribution for the establishment of the G. Whitaker International Burns Prize aimed at recognizing the activity of the most qualified experts from all countries in the field of burns pathology and treatment.
The amount of the prize is fixed at twenty million Italian lire. The prize will be awarded every year by the month of June in Palermo at the seat of the G. Whitaker Foundation.
The Adjudicating Committee is composed of the President of the Foundation, the President of the Sicilian Region, the Representative of the Accademia dei Lincei within the G. Whitaker Foundation, the Dean of the Faculty of Medicine and Surgery of Palermo University, the President of the Italian Society of Plastic Surgery, three experts in the field of prevention, pathology, therapy and functional recovery of burns, the winner of the prize awarded in the previous year, and a legal expert nominated in agreement with the President of the Region as a guarantee of the respect for the scientific purpose which the legislators intended to achieve when establishing the prize.
Anyone who considers himself/herself to be qualified to compete for the award may send by January 3 1 st 1999 a detailed curriculum vitae to: Michele Masellis M.D., Secretary-Member of the Scientific Committee G. Whitaker Foundation, Via Dante 167, 90141 Palermo, Italy.




 

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