Annals of the MBC - vol. 2 - no 4 - December 1989

TRAITEMENT DES RETRACTIONS DES PLIS DE FLEXION DES MEMBRES

S. Baux

Hopital Rothschild, Paris, France


RÉSUMÉ. Les rétractions des plis de flexion ~es membres sont fréquentes parmi les séquelles de brûlures, et elles entraînent un déficit fonctionnel. Les indications thérapeutiques dépendent non seulement de l'importance de la rétraction mais aussi de la largeur de la bride. La section des brides fait apparaître un déficit cutané important et rend évidente la nécessité d'un apport de peau. Pour la réalisatiôn de celui-ci, l'auteur préfère la technique des lambeaux locaux. Puisque la plastie en Z n'est pas normalement possible, on se sert d'une modification: le lambeau en I.C. L'auteur décrit les principes exposés pour ce qui concerne les rétractions de l'aisselle, du coude et du creux poplité.

Parmi les séquelles de brulures, les rétractions des plis de flexion des membres sont fréquentes et entraînent un déficit fonctionnel.
Plus que l'importance de la rétraction, c'est la largeur de la bride qui conditionnera les indications thérapeutiques. On peut schématiquement opposer les brides linéaires avec deux versants de peau saine aux larges placards où l'ensemble du pli de flexion est cicatriciel. Entre ces deux extrêmes il existe très fréquemment des brides larges laissant une partie de peu saine affectant souvent la forme d'un hémi-placard. Enfin dans certains cas, la rétraction peut être due à des ossifications para-articulaires avec ou sans bride cutanée.
La simple section des brides fait apparaître un déficit cutané toujours plus important que l'on aurait pu le supposer et rend évidente la nécessité d'un apport de peau. La réalisation de celui-ci peut faire appel à un quelconque procédé de chirurgi e plastique: greffe cutanée, lambeau local, lambeau à distance ou encore lambeau libre microanastomosé.
La greffe cutanée, si elle est de réalisation simple, comporte de nombreux inconvénients. En particulier elle prend souvent mal au niveau des plis de flexion où les surfaces mises à jour par l'incision sont irrégulières, avec souvent des zones tendineuses ou aponévrotiques peu propices.
Les lambeaux micro-anastomosés, à l'évidence de réalisation plus complexe, sont en règle trop épais comblant le creux des plis de flexion et gênant la flexion extrême, remplissant ainsi imparfaitement le rôle physiologique de la fonction et en plus souvent inesthétiques.
C'est dire que notre préférence va aux lambeaux locaux. La plastie en Z n'est possible que dans le cas assez rare de bride linéaire avec de part et d'autre de la peau saine. Si la bride est plus large, surtout si elle réalise un hémi-placard, il semble dangereux de mobiliser la peau cicatricielle. Nous avons décrit une modification de la plastie en Z: le lambeau en I.C. La peau cicatricielle est incisée perpendiculairement à la jonction bride peau saine. Le long de celle-ci est dessiné un lambeau en C en peau saine qui, par rotation de 90', vient prendre place dans l'incision (le 1) pratiquée et qui s'ouvre peu à peu au fur et à mesure de la libération de la rétraction.
Lorsqu'il existe un placard, force est de mobiliser la peau brulée, le lambeau doit être alors fascio-cutané. Celui-ci peut être dessiné de façon classique sur le membre mais nous avons aussi décrit une modalité particulière dite "lambeau de recul". Une incision arciforme débute latéralmente, légèrement au-dessus du pli de flexion intéressé, descend longitudinalmente le long de l'axe du membre, en direction distale, plus ou moins loin selon l'importance de la rétraction puis remonte latéralement sur le versant opposé. L'incision intéresse à la fois peau et fascia. Ce lambeau est décollé peu à peu et la rétraction libérée. Le lambeau monte ainsi "en reculant", couvrant le pli de flexion. La zone laissée à nue par le lambeau sera distale en zone non mobile et pourra être greffée sans inconvénient.
Enfin nous nous adressons parfois à des lambeaux à distance simples (par exemple thoraco-brachial) malgré l'inconvénient des deux temps opératoires et de la période d'immobilisation intermédiaire.
Au total, notre attitude peut se résumer en quelques principes:

  • incision de la rétraction plus qu'excision
  • nécessité d'un apport cutané
  • préférence aux lambeaux locaux
  • ne pas mobiliser la peau cicatricielle ou alors faire un lambeau fascio-cutané
  • la greffe cutanée n'est faite seulement que sur les zones non mobiles.

Pour illustrer l'application de ces principes nous exposerons brièvement notre expérience des rétractions de l'aisselle, du coude et du creux poplité.

Aisselle:

Au niveau de l'aisselle, le plus souvent la peau du sommet du creux est intacte. La rétraction intéresse le pilier antérieur ou le pilier postérieur, voire, mais plus rarement les deux.
C'est le type même de la lésion relevant de la plastie en I.C. La section de la bride est perpendiculaire au bord de celle-ci et monte jusqu'au neutre, c'est-à-dire le point qui demeure fixe lors de l'abduction du bras. Le lambeau en C est dessiné par le creux alaire, en peau saine, à pédicule distal ou proximal selon les plus grandes facilités.
Lorsque les deux piliers sont atteintes, l'intervention comporte deux temps séparés par une période de deux mois. La zone la plus rétractée est opérée en premier.
Sur 51 lambeaux en I.C. pratiqués pour rétraction axillaire, nous avons eu 2 nécroses partielles, toutes situées au voisinage du sommet proche du point neutre. Leur cicatrisation spontanée n'a pas influé sur la qualité du résultat. 12 fois, une greffe complémentaire a été pratiquée sur une partie du lieu de levé du lambeau, toujours en zone non mobile. Le gain moyen de mobilité a été de 80' à 6 mois mais il est remarquable de noter que le résultat continue à progresser et tous les malades revus à plus d'un an ont une abduction normale. Ce n'est que dans les cas rares de placard cicatriciel total de l'aisselle que nous nous sommes adressés à d'autres méthodes: lambeau tubulé à distance ou depuis quelques années, lambeau de grand dorsal greffé. Les résultats ont été dans l'ensemble moins bons qu'avec les lambeaux en I.C., il s'agissait aussi de cas un peu difficiles.

Coude:

Au niveau coude, chaque fois qu'il existait suffisamment de peau saine, une plastie en I.C. a été réalisée. Lorsqu'il s'agissait de placards totaux avec une peau thoracique saine, un lambeau thoraco-brachial a été utilisé. Enfin lorsque celle-ci est cicatricielle un lambeau du recul a été pratiqué et les résultats ont été les suivants:

  • Plastie en LC 48: résultants satisfaisants: 96%
  • Lambeau thoracique 18: résultats satisfaisants: 72%
  • Lambeau de recul Il: résultats satisfaisants: 82%.

Un cas particulier est représenté par les rétractions avec ossification para-articulaire dont le coude est la localisation préférentielle chez les brulés. Ces ostéomes ne doivent être opérés que lorsqu'ils sont "mÛrs" comme en témoignent la stabilité à la radiographie et la diminution de fixation à la scintigraphie. S'ils s'accompagnaient d'une bride cutanée (ce qui n'est pas toujours le cas), celle-ci doit être opérée dans un premier temps pour ne pas risquer de mélange un temps osseux et un temps qui n'est pas parfaitement aseptique. Sur 14 cas nous avons obtenu 6 excellents résultats avec retour à la mobilité normale, 5 satisfaisants avec une mobilité d'au moins 90' autour de l'angle droit et 3 échecs correspondants à des cas opérés trop tôt à l'époque où nous ne disposions pas de scintigraphie systématique. Nous n'avons observé aucune différence entre les ostéomes avec ou sans bride cutanée coexistante.

Creux poplité:

Au niveau du creux poplité, les rétractions de moins de 40' en rapport avec hémi-placard et comportant une quantité suffisante de peau saine adjacente ont été traitées par I.C. (9 cas avec 6 excellents résultats; 2 cas excisés et greffés ont été des échecs). Lorsqu'il existe un placard total et que la rétraction est inférieure à 30% 3 lambeaux fascio-cutanés ont donné 3 résultats satisfaisants, un lambeau en I.C. a été un échec (ce qui n'est pas étonnant puisque nous avions contrevenu au principe de ne pas mobiliser la peau brulée). Enfin 2 excision-greffes ont donné 2 résultats convenables mais la rétraction était tout à fait minime.
Dans les rétractions supérieures à 45' nous nous sommes adressés à des lambeaux de jumeau. La situation de ces cas est particulièrement difficile. En effet l'incision met à nu le paquet vasculo-nerveux qui se tend à l'extrême, parfois même sont nécessaires des ténotomies des ischiojambiers, voire une capsulotomie postérieure. La section basse des jumeaux a leur terminaison sur la lame du soléaire permet de disposer de deux lambeaux musculaires d'excellente qualité, capable de recouvrir les éléments nobles. Ces lambeaux musculaires sont ensuite greffés en peau mince.
Il faut insister sur la tension extrême que subit le paquet vasculo-nerveux. Celui-ci doit être libéré très haut et très bas, mais surtout s'il existe le moindre flessum de hanche celui-ci doit être opéré dans un premier temps de façon à obtenir une possibilite d'hyperextension à ce niveau qui détendra la tension du paquet vasculo-nerveux. Ce geste nous apparaît un élément tellement primordial que l'intervention commence quasi -constamment par cet abord qui peut comporter des ténotomies.
8 cas ont été opérés selon ces principes (dont certains rétractés à plus de 90%) avec 8 excellents résultats.
Au total, il faut insister en terminant sur 2 points qui nous semblent capitaux:

  • la nécessité d'une classification précise deslésions de façon à leur opposer une technique
  • la fiabilité des principes que nous avons exposés plus haut et qui a été vérifiée par l'expérience appropriée et adaptée à chaque cas.

SUMMARY. Retraction of flexion folds in the limbs is frequent among bum sequelae, causing functional deficit. Therapy depends on the extent of the retraction and the width of the bridle. Section of the bridles reveals considerable cutaneous deficit and the necessity of skin-grafting is clear. The recommended skin-grafting technique is that of local flaps. As Z-plasty is usually not possible, a modification is used: the IC flap. The main principles are described of treatment of retractions in the axilla, elbow and the popliteal fossa.




 

Contact Us
mbcpa@medbc.com