Annals of the MBC - vol. 3 - n' 2 - June 1990

LES SÉOUELLES DE LA BROLURE: SIGNE INEFFAÇABLE DU PASSAGE DE LA MALADIE SUR LE CORPS ET SUR LA PERSONNE

Mosca k Amico W Masellis M.

Divisione di Chirurgia Plastica e Terapia delle Ustioni, Ospedale Civico USL 58, Palermo, Italia


RÉSUMÉ. Dans la civilisation technologique occidentale l'image du corps est construite par rapport à la culture d'origine et à la conception de l'homme caractéristique de cette civilisation. L'idée de la beauté dans le monde occidental se heur-te à l'oeuvre du chirurgien plastique pour ce qui concerne la correction des séquelles des brûlures. La maladie "brûlure" en général et les séquelles des brûlures en particulier créent un nouveau rapport entre corps et culture. En effet, dans notre civilisation il semble difficile d'accepter n'importe quelle division entre corps et culture, parce que les imperfections bouleversent l'équilibre construit entre les deux parts. La découverte d'une nouvelle expressivité du corps qui puisse aussi embrasser l'imperfection c'est une condition essentielle pour la création d'une nouvelle culture de la corporéité que l'on peut utiliser pour exprimer les potentialités du corps non seulement esthétiques mais aussi éthiques.

Chaque civilisation bâtit une image idéale du corps physique relativement à l'idée de l'homme, à la fonction qu'on lui confie et à ses buts. La civilisation confie aux arts la tâche de fixer une image artistique de sorte que la forme, le signe du corps gravé ou tracé deviennent un modèle, une mesure de la réalité culturelle à la quelle ils se rapportent. Dans la civilisation grecque, le sculpteur athénien Praxitèle gravait sur le marbre presque toujours une statue isolée, de dimensions réelles, d'une beauté idéale qui correspondait à l'idéal classique. Les personnages de Praxitèle, même en ce qui concerne les divinités olympiennes, sont reproduits à dimension humaine, avec la grâce d'un geste ou d'un mouvement qui sont l'expression d'un monde de valeurs intérieures en parfait équilibre avec les valeurs esthétiques. La beauté devient ainsi une création culturelle, le résultat final d'un long processus de construction dans lequel l'homme se propose dans sa "forme" la meilleure en complétant l'oeuvre de la nature. L'homme fait donc de son corps un reflet de valeurs et un moyen pour exprimer des signes qu'il reçoit de la mémoire de son groupe et de la civilisation à la quelle il appartient.

Fig. 1 Fig. 2
Fig. 1 Fig. 2

Ces réflexions initielles sont utiles pour introduire un problème spécifique assez complexe: qu'est-ce qu'il arrive quand, à cause des résultats d'une brûlure, naît un corps qui ne ressemble plus à l'idéal de beauté, à l'équilibre des formes, à l'harmonie des gestes qui appartiennent à notre civilisation?
La maladie, en géneral, constitue une grave menace pour l'intégrité de notre corps, la maladie "brûlure" en particulier blesse irrémédiablement le corps à l'extérieur et constitue un élément qui bouleverse l'ordre extérieur de la "forme" et l'équilibre intérieur de l' "identité" de l'individu soit per rapport à lui-même soit par rapport à son groupe. L'organe peau frappé par la brûlure, ainsi que tant organe de notre corps, influence le rapport entre l'homme et l'expérience. La fonction de la peau consiste à mettre largement en relation l'intérieur avec l'extérieur, elle protège et isole le corps, et en même temps l'expose à l'ambiance. La brûlure interrompt la fonction que la peau a de liaison entre l'intérieur et l'extérieur, en exposant l'homme et ses organes à de nombreux risques, en le rendant dépourvu de ses défenses.
Le chirurgien plastique, qui ne peut et ne doit reduire son oeuvre à la simple démonstration de capacité technique, doit être conscient de la diversité des valeurs et des signifies qui sont dans le corps: la vie, la mort, la maladie, la capacité des rapports avec les autres, la civilisation du groupe. En agissant sur le corps d'un malade brûlé, l'équipe entière: l'infirmier, l'assistant social, le physiothérapeute, le psychologue et le médecin, doit s'interroger et savoir cueillir les suggestions de l'expérience: l'évènement brûlure brûle le corps en le trasfigurant, en l'exposant à l'expérience de la privation de la peau et en bouleversant quelque fois irrémédiablement un ordre esthétique et un équilibre intérieur.

Fig. 3 Fig. 4
Fig. 3 Fig. 4

A l'intérieur de l'individu brûlé se casse l'idée de son unicité physique, à cause de l'impossibilité mitielle d'intégrer la nouvelle image gâtée à son propre identité corporelle et à l'identité précédente. Devant à son image brûlée à la glace, on peut augmenter une scission puisque la glace reflète les linéaments et les traits d'un étranger, un inconnu à soi-même, dépourvu du sentiment primitif de familiarité. En particulier c'est dramatique le résultat enlaidant du visage pour la connotation du visage comme zone d'identification personnelle et sociale, pour son évidence et pour la localisation dans le visage d'importantes fonctions mimiques. En général on remarque que plus un corps brûlé est loin du point de repère esthétique plus il y a des difficultés pour l'individu dans l'acceptation d'un corps "différent", d'un corps marqué par le feu et qui ne répond plus aux caractéristiques esthétiques sur lesquelles se fonde culturellement l'attraction physique et sociale.
Le problème est complexe et demande une sensibilisation de l'équipe entière et une modalité convenue pour une approche relationelle et une intervention opérative. Un homme brûlé dont le visage peut être dépourvu de quelque organes comme le nez, ou les oreilles, et peut avoir des rétractions cicatricielles aux paupières ou au cou, aux articulations et dans tous les emplacements critiques éventuellement frappés par la maladie, cet homme doit graduellement devenir conscient de ne pas pouvoir retrouver sa propre image telle qu'elle était avant l'accident.
A l'occasion de graves résultats qui gâtent le visage et le corps il est essentiel de proposer clairement les vraies possibilités de récupération esthétique qui ne restaureront en tout cas l'image primitive. Pour notre expérience nous pensons que tout tentative qui alimente de tels espoirs est dangereuse pour l'équilibre psychique du malade qui, inutilement trompé, et déjà éprouvé, peut être amené à se tuer.
Le chirurgien se propose au malade avec une série d'interventions qui puissent ramener l'aspect du corps le plus possible proche de la normalité: avec cette limitation il lui redonne la confiance dans la possibilité de récuperer une nouvelle image acceptable du point de vue esthétique. Dans le même temps l'équipe entière est engagée dans la réalisation d'un délicat processus psychologique qui facilite l'acceptation interne de son nouvel aspect. Cette tâche n'est pas facile, la nouvelle image extérieure doit naÎtre en se liant le plus possible à une nouvelle image interne. L'évènement "brûlure" doit constituer une occasion pour une réflexion collective de l'équipe sur des problèmes qui regardent: l'idée de limitation, d'imperfection, les points de repère culturels, le développement équilibré de capacités essentielles tel que les capacités esthétiques. Il est donc possible, dans cette vision, d'orienter le malade à interpréter tout ce qui concerne le corps comme un langage riche en signifiés expressifs de l'intégrité de la personne, comme langage de la relation, comme fonction d'une convention sociale. En retrouvant cette complète expressivité du corps, le malade avec de graves résultats de brûlure peut être amené à ne pas vivre sa limitation et son imperfection comme une sorte de limitation de sens, une perte de signifié global de la personne, réduite seulement à un corps. La caractéristique de favoriser cette orientation d'idées et de faits a le sens spécifique de ne favoriser ni une mise en valeur du corps par rapport à la personne, ni même de sous-évaluer la corporeité comme quelque chose de secondaire ou peu important. Le malade avec de graves séquelles de brûlure est aidé par toute l'équipe à retrouver ce riche langage du corps, cette complète expressivité du corps qui est essentielle à notre avis pour reconstruire cette identité globale corps-personne, corps-civilisation qui à cause de l'évènement brûlure a blessure. subi une bouleversante

SUMMARY. In our western techological civilization the image of the body is constructed in relation to the culture of origin and the concept of man characteristic of this civilization. The concept of beauty in the western world comes into conflict with the work of the plastic surgeon in the correction of burn sequelae. The burn illness in general and burn sequelae in particular create a new relationship between body and culture. In fact, in our civilization it seems to be difficult to accept any division between body and culture because imperfections break the constructed equilibrium between the two parts. The discovery of a new expressiveness of the body that is also capable of embracing imperfection is an essential condition for the creation of a new culture of corporcity that can be used to express not only aesthetic but also ethical potentialities of the body.




 

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