Ann. Medit. Burns Club - vol. 6 - n. 2 - June 1993
ORGANISATION DES SECOURS
D'URGENCE
Flaujat A., Maille P.
AMELISAP, France
RESUME. Les auteurs
décrivent l'organisation des secours d'urgence en France, en considérant les
implications pour le corps médical et pour le grand publie. En particulier, ils
décrivent la création du Centre 15, une structure administrative de contrôle et de
gestion et un organisme d'évaluation d'une détresse et de répartition des moyens
d'intervention. Il comprend essentiellement un centre de réception et de régulation des
appels, qui peuvent provenir directement du publie on d'un professionnel de la santé. Les
moyens et les buts du Centre 15 sont décrits, comme aussi le Service de l'Aide Médicale
Urgente.
L'urgence
Pour le médecin, l'urgence
désigne toute affection ou lésion mettant en jeu le pronostic vital à brève
échéance, ou susceptible d'entraîner des séquelles invalidantes sévères.
Il s'agit là d'une définition de technicien qui nécessite une évaluation technique
initiale, la mise en jeu rapide de moyens de réanimation et qui bien sûr obligera
presque toujours à une hospitalisation.
Pour le grand public, l'urgence signifie simplement le recours rapide à l'aide et aux
soins d'un tiers; donc essentiellement pour résoudre una situation que la victime ne peut
solutionner elle-même, intervention la plus rapide possible; là il ne s'agit plus
forcément d'une détresse d'ordre médical, et si celle-ci l'est, elle ne nécessitera
pas pour autant l'intervention de moyens que l'on peut qualifier de lourds: ambulance de
réanimation et personnel spécialisé.
Pour le corps médical
La response à l'urgence c'est des
moyens de transports et de réanimation et du personnel qualifié, mis à disposition de
la victime de la manière la plus rapide possible, mais seul un médecin ou une personne
ayant une culture médicale suffisante est susceptible de déterminer s'il s'agit ou non
d'une urgence au sens médical du terme.
Pour le grandpublic
La réponse à l'urgence, c'est avant
tout la venue d'un tiers, qualifié ou non, accidentelle ou dans le cadre d'un organisme
de secours, qui aura pour rôle soit de dénouer la situation ayant entraîné l'appel, ou
faire à son tour appel à du personnel et des moyens matériels plus qualifiés.
Le point commun à ces deux visions de l'urgence est essentiellement la notion de
rapidité d'intervention.
La réponse peut donc être individuelle:
- famille, voisinage, professionnels de santé de terrain:
infirmiers, paramédicaux, pharmaciens, médecins ou bénévoles formés au secourisme et
aux premiers soins.
Elle peut être collective:
- services sanitaires ou sociaux locaux, associations
caritatives, sanitaires, ou de secouristes.
Mais ces moyens de proximité immédiate
risquent d'être dépassés matériellement ou techniquement dès que nous rentrons dans
le domaine de l'urgence médicale au sens strict et la victime devra donc faire appel à
des moyens de secours.
Jadis la notion de secours médicaux d'urgence signifiait tout simplement le transport le
plus rapide possible vers des techniciens de soins, le plus souvent en l'occurrence
l'hôpital ou la clinique les plus proches.
Les enseignements des services de santé des années, au cours de la dernière guerre
mondiale et de la guerre de Corée, ont amené nombre de praticiens à étudier la
mortalité et la morbidité de ces transports, et l'expérience militaire aidant,
actuellement les secours médicaux d'urgence consistent à amener des techniciens de
santé au chevet même de la victime, et à préparer celle-ci au transport qui se fera
sous surveillance sanitaire: c'est le conditionnement et le transport médicalisé.
Pour appliquer ces principes il faut:
un centre de traitement de l'alerte, qui reçoit les appels de détresse et les répercute
sur les intervenants:
- avec donc des lignes téléphoniques d'appel au numéro
facilement mémorisable;
- du personnel chargé de la réception des appels;
- des moyens de répercuter ces moyens sur les intervenants;
et b) des équipes d'interventions
comprenant:
- des véhicules de transport disposant de moyens de
réanimation poussée;
- du personnel qualifié susceptible d'évaluer et de
commencer à traiter la détresse.
Tout cela disponibile 24 h sur 24, tout au
long de l'année, susceptible d'intervenir en tous lieux dans un délai raisonnable.
Cette unité de base des secours d'urgence peut par contre être d'origines très
diverses, soit d'ordre public (antennes hospitalières tels les SAMU et SMUR, les
Sapeurs-Pompiers et les Services de Police), soit d'ordre privé (syndicats ou
associations d'ambulanciers, de paramédicaux ou de médecins qualifiés, à but lucratif,
organisations non gouvernementales ou caritatives ou sociales à but non lucratif- Croix
Rouge, Ordre de Malte, Sociétés Mutualistes, etc.) car à ce niveau de mobilisation de
moyens matériels et humains et de compétences la réponse ne peut qu'être le fait d'une
collectivité.
Différents systèmes bâtis sur ce
schéma existent ou ont existé à travers le monde. Ils posent déjà deux problèmes:
- quelle doit être la qualification et la formation de la
personne qui reçoit l'appel de détresse? - quelle doit être la qualification et la
formation de la personne qui intervient sur les lieux?
La réception de l'appel:
- peut être le fait de personnel administratif. secrétaire,
agent hospitalier, stationnaire sapeur pompier, policier ou gendarme, peut être le fait
de personnel paramédical ou médical: infirmière ou médecin.
L'avantage du personnel administratif:
- peu coûteux en salaire, en formation;
- souci méticuleux de recueillir des renseignements
administratifs (état civil, lieu exact de l'intervention demandée, couverture sociale).
L'inconvénient du personnel
administratif:
- difficulté d'apprécier l'urgence de la détresse, et les
moyens nécessaires à l'intervention; ne peut donc être sûr et efficace que si la
réponse est univoque; sur tout appel on fait intervenir un véhicule d'intervention
normalisé qui devra faire face à tous les types de détresse.
L'avantage du personnel médical:
- appréciation plus sûre des moyens d'interventions
nécessaires, de févolutivité éventuelle des détresses et donc des renforts
nécessaires, des lieux et services hospitaliers où évacuer et traiter les victimes.
L'inconvénient du personnel médical:
- coûteux en salaire et formation;
- impossibilité pour l'organisme de disposer éventuellement
de personnel en nombre suffisant.
L'intervention: outre le véhicule et le
matériel médical se pose aussi la question de la qualfication du personnel
d'intervention:
soit: paramédical type paramédic US, ayant une formation proche dc celle d'un infirmier,
appliquant des protocoles pré-établis de conditionnement des victimes destinés à
préserver ou maintenir les fonctions vitales, et nous avons toutes les possibilités
depuis le super-secouriste habitué à mettre en pratique son savoir jusqu'à finifirmier
anesthésiste, l'initiative laissée à l'intervenant de l'utilisation ou non de drogues
d'urgence étant fonction de sa qualification;
soit: médecin si possible qualifié en médecine d'urgence: qui a pour avantage de poser
un diagnostic et de pouvoir commencer un traitement étiologique au chevet même du
malade, il a aussi l'avantage de pouvoir préciser l'étendue et la gravité exacte des
lésions, de pouvoir préciser le matériel et le personnel à lui envouer en renfort et
de pouvoir prévoir le type de service de réanimation ou de soins nécessaire à la
victime.
Tout organisme à vocation de soins d'urgence, quels que soient sa structure et son
support, peut se trouver dépassé par l'afflux d'appels, le nombre important de victimes
sur un accident, la nécessité de matériels de soins ou de réanimation spécifique, et
peut se voir dans l'impossibilité d'y faire face. Cela est rare, mais beaucoup plus
fréquemment c'est l'abondance qui devient une gêne, avec l'afflux de secours, la
concurrence entre organismes de secours, sans compter les disparités de qualifications
des différents personnels se trouvant sur les lieux. Là se trouve l'origine d'une
nécessaire organisation des moyens de secours.
L'organisation des moyens de secours
L'organisation des moyens de
secours qui va coordonner les interventions des différents organismes se préoccupant ou
travaillant dans les secours d'urgence va relever du pouvoir politique, et est devenu
nécessaire, en raison du coût pour la collectivité de chacune de ces interventions, s'y
ajoute un notion de meilleur service des usagers qui ont souvent perdu toute initiative
personnelle lors d'une détresse quelconque, et qui en outre, dans le cas de populations
mobiles, ont perdu tout contact avec le corps médical et s'en trouvent d'autant plus
désorientés ou désemparés.
L'organisation qui doit prendere en compte les différents organismes ayant vocation à
l'urgence va donc comprendre un centre de réception des appels, d'analyse de ces
derniers, et de déclenchement des secours les plus proches du lieu de la détresse.
Il doit en outre suivre et prévoir le devenir de cette intervention: éventuels renforts
sur les lieux, nécessité de transports multiples et divers, réception dans un service
hospitalier spécialisé.
C'est ce que nous avons tenté de faire en France avec la création du Centre 15.
Son aire d'intervention est en général un département français, dont la population
peut varier de 400.000 à plusieurs millions d'habitants.
Il comprend une structure administrative de contrôle et de gestion, dans laquelle sont
représentées toutes les parties prenantes, sous la présidence du Préfet, c'est le
Comité Départemental de l'Aide Médicale Urgente et des Transports Sanitaires qui
regroupe tous les intervenants de l'urgence:
- représentants locaux des ministères concernés
- représentants de collectivités territoriales
- représentants des caisses d'assurances maladies
- représentants des professionels libéraux: médecins,
cliniques privées, ambulanciers, ONG.
Ce comité est chargé de la mise en place
du Centre 15, de recenser les établissements hospitaliers publics ou privés susceptibles
d'accueillir ces urgences, de recenser les moyens de transport sanitaires disponibles, de
recenser les praticiens 'disponibles pour répondre aux urgences, de veiller à la
qualité de la distribution de l'aide médicale urgente et à son ajustement aux besoins,
de s'assurer de la coopération des personnes physiques ou morales participant à l'Aide
Médicale Urgente, de prendre connaissance des bilans annuels d'activité établis par
l'administration sanitaire, d'informer la population sur les circonstances et les moyens
de faire appel au Centre 15.
Il est lui-même divisé en deux sous-comités techniques:
- le sous-comité médical qui regroupe tous les médecins
membres du comité départemental dont le rôle est d'examiner toutes les questions
relevant de l'activité médicale du Centre 15 et de contrôler les interventions
effectuées, de veiller au respect de la deontologie médicale et du secret professionnel;
- le sous-comité des transports sanitaires
qui regroupe
tous les représentants des organismes de transports de victimes et qui à pour rôle de
contrôler l'état des véhicules de transport sanitaire et de donner ou retirer
l'agrément aux ambulanciers.
Le Centre 15 proprement dit est un
organisme d'évaluation d'une détresse, et de répartition des moyens d'intervention
quelle que soit leur origine (publique ou privée), leur qualification (paramédicaux,
médecins, anesthésistes réanimateurs), les moyens mis en oeuvre (praticien libéral ou
paramédical dans son véhicule personnel, ambulances de transport simple, ambulances de
réanimation, moyens de transport aériens). Il comprend essentiellement un centre de
réception et de régulation des appels.
Cet appel peut provenir directement du public en composant le numéro 15, à deux chiffres
peut-être facilement mémorisable, dont l'appel est gratuit à partir des cabines
publiques, et dont le cheminement à travers le réseau téléphonique est prioritaire, ou
d'un professionnel de la santé. Il va être reçu par du personnel administratif rompu à
cet usage: les permanenciers, qui vont recueillir le maximum d'éléments géographiques
et administratifs possibles, le numéro de l'appelant pour pouvoir éventuellement le
joindre en cas de coupure de la communication; dès que l'appel concerne des problèmes
médicaux, un médecin spécialisé, le médecin régulateur, suit la conversation et
intervient au besoin. Ce médecin doit, sur simple appel téléphonique, poser un
diagnostic de gravité, prévoir le type et la qualité de l'intervenant nécessaire et
déclencher son intervention. Il doit ensuite suivre par radio l'intervention et prévoir
sur le rapport du médecin intervenant l'évacuation et la réception de la victime par un
service spécialisé. Il peut s'aider pour cela de certains logiciels informatiques d'aide
à la décision, ainsi bien sûr que des listings informatiques de tous les moyens
d'intervention, d'évacuation et d'accueil disponibles.
Ce centre doit donc disposer de moyens de communication très importants, téléphoniques
pour recueillir les appels, adiophoniques pour rester en contact avec les intervenants.
Chez nous, nous avons la particularité d'avoir deux autres centres de réception d'appel
de détresse avec des numéros à deux chiffres:
- le CODIS des sapeurs pompiers, tél. 18
- le centre de réception des appels des services de maintien
de l'ordre, tél. 17.
La législation prévoit une
interconnexion de ces centres de réception d'appel de détresse, et le transfert vers le
médecin régulateur de tout appel d'ordre médical.
Nous aurions pu, tel cela a été proposé au sein de Ja CEE pour le 112, prévoir une
réception de cet appel par les services de Police mais peut-être est-ce notre
tempérament latin, ou le poids de notre histoire, nous Médecins gardons toujours une
certaine méfiapce vis-à-vis des services de Police, et estimons que dans le colloque
singulier qui s'engage entre le médeciq et le malade il y a des faits et des informations
qui ne regardent pas les services de .police; cette notion du secret médical partagé,
admise par notre législation, est le gage de la confiance que nous voue le patient.
Comite Departemental De L'Aide
Medicale Urgente
Président: Le Préfet
REPRESENTANT DE L'ETAT
- Ministère de l'intérieur
- Ministère de la santé
COMME DEPARTEMENTAL DE VAIDE MEDICALE
URGENTE
Présîdent: Le Préfet
- Directeur Départemental des Services d'Incendie et de
Secours
- Médecin Chef du Service Départemental &Incendie et de Secours
- Le commandant du corps de Sapeurs Pompiers le plus important du département
- Directeur Départemental des Affaires Sanitaires et Sociales
- Médecin inspecteur de la Santé
- un médecin du SAMU (désigné par le Préfet)
- un médecin du SMUR (désigné par le Préfet)
- un Directeur d'hôpital dôté d'un SMUR
- un représentant syndical du personnel hospitalier
REPRESENTANT LES COLLECTIVITES TERRITORIALES
deux représentants du Conseil Général
deux représentants des Mairies
REPRESENTANT LES CAISSES D'ASSURANCE MALADIE
un représentant de la Sécurité Sociale un
représentant de la Mutualité Agricole un représentant de la Caisse des Artisans et
Commerçants
REPRESENTANT LES PROFESSIONS LIBERALES
deux représentants des Syndicats Médicaux
Nationaux
deux représentants des Associations Départementales dAide Médicale Urgente
un représentant du Conseil de lOrdre
deux représentants de l'hospitalisation privée quatre représentants des
Associations Nationales des ambulanciers un représentant des Organisations
Départementales des ambulanciers un représentant du Conseil Départemental de la Croix
Rouge
ROLE DU COMITE DEPARTEMENTAL DE L'AIDE
MEDICALE URGENTE
- facilite d'installation du Centre 15
- établit la liste des établissements hospitaliers publics ou privés
- établit la liste des moyens de transport sanitaire
- établit la liste des praticiens susceptibles d'intervenir
- surveille la qualité de la distribution de l'Aide Médicale Urgente et son ajustement
aux besoins
- s'assure la coopération des personnes physiques ou morale participant à l'Aide
Médicale Urgente
- prend connaissance des bilans annuels d'activité
- informe les populations sur la mission du Centre 15 et la manière d'y recourir
 |
 |
SUMMARY. A description is given of the
organization of emergency rescue work in France, considering the implications for medical
staff and the general public. In particular, a description is given of Centre 15, which is
an administrative control and management structure and an organism for assessing a
disaster and setting up relief operations. The Centre essentially receives and responds to
calls for help which may come directly from members of the public or from medical
operators. The means and the aims of the Centre are described, as also the service of Aide
Wdicale Urgente (Emergency Medical Aid).
|