Ann. Medit. Burns Club - vol. VIII - n. 3 - September 1995

DECORTICATION OSSEUSE DES OS LONGS DANS LE TRAITEMENT DES BRULURES PROFONDES

Roug6 D., Bodnar M., Micheau Ph., Gavroy J.P.*, Grolleau J.L., Chavoin J.P., Costagliola M.

* Unité des Grands Brûlés, Service de Chirurgie Plastique, CHU Rangueil, Toulouse, France
** Centre de Rééducation du Dr Ster, Lamalou Les Bains


RESUME. La décortication osseuse des os longs dans le traitement des brûlures profondes est une technique utile chez les grands brûlés longtemps hospitalisés au Centre de Rééducation et chez le sujet âgé. Les modalités techniques sont variables mais une surveillance médicale est nécessaire. Douze cas ont été réalisés entre 1987 et 1992. Les avantages et les inconvénients sont précisés. Les indications qui en découlent sont détaillées.

Devant une perte de substance avec exposition ou lésion osseuse il est classique en chirurgie plastique de réaliser un parage, d'assurer la stabilisation ossseuse et d'apporter un lambeau de couverture. 1,2 Cependant chez le brûlé les lésions osseuses et cutanées sont particulières:

  • Les lésions osseuses sont souvent superficielles et atteignent la plupart du temps une seule corticale.
  • Les expositions osseuses ne comportent pas -fréquemment de continuité.
  • Il existe peu ou pas de décollement périosseux des parties molles.
  • Le capital cutané est limité, il n'autorise donc pas de gestes de transposition cutanée ou musculaire très vaste.
  • La rééducation en Centre est souvent longue, en particulier chez le grand brûlé.

La technique de décortication osseuse est un procédé classique qui a été surtout décrit au niveau de la voûte crânienne? Cette technique a été largement utilisée dans les carbonisations de la face et de la voûte crânienne et du crâne.' Cependant cette technique a été moins décrite pour les os longs en particulier en raison de l'avènement des lambeaux homovasculaires ou hétérojambiers voire microchirurgicaux.
Le but de ce texte est de montrer que cette technique de décortication osseuse des os longs chez le brûlé n'est pas obsolète et qu'elle possède des indications qu'il est nécessaire de préciser.

La technique de décortication osseuse

Lorsqu'un os est nécrosé ou lorsqu'il est exposé, et dépériosté, plusieurs possibilités de décortication existent (Fig. 1):

Fig. 1 - Technique de la décortication osseuse des os longs.

Fig. 1 - Technique de la décortication osseuse des os longs.

La séquestration
Elle consiste à exposer l'os jusqu'à sa séquestration puis à réaliser l'ablation du séquestre jusqu'à obtention d'un bourgeon qui se développe au dépens de l'os spongieux une fois qu'une des corticales a été enlevée.

La décortication d'emblée
Cette technique consiste au ciseau froid à réaliser l'exérèse d'une des deux corticales jusqu'à l'obtention d'un os spongieux sain qui autorise un bourgeonnement secondaire.

Les perforations
Des perforations peuvent être réalisées au niveau d'une de deux corticales comme au niveau de la voûte crânienne ppur obtenir après séquestration des espaces laissés libres un envahissement par le bourgeon tissu spongieux sous-jacent. Il est à remarquer qu'un niveau des os longs ces perforations aboutissent toujours à une lyse secondaire des espaces osseux laissés en place.

Dans tous les cas
Secondairement la reconstruction du revêtement cutané est assuré soit par une épidermisation centripète soit par l'apport d'une greffe dermo-épidermique mince posée sur le bourgeon conjonctif issu du tissu spongieux.Il est à noter que la durée du traitement dépend pour une grande partie du temps nécessaire à la disparition de l'os nécrose si bien le choix de la technique peut dépendre du temps de rééducation hospitalisée dont on dispose. En effet ce traitement exige une surveillance médicale stricte.

Les résultats

Douze cas de décortication osseuse ont été réalisés au niveau des os longs entre 1987 et 1992 alors que pendant la même période environ 600 brûlés ont été traités. Au niveau des lésions osseuses, il s'agissait sept fois d'exposition osseuse et cinq fois de nécrose osseuse. Les causes des nécroses étaient quatre fois thermiques et une fois électrique ayant entraîné un séquestre limité.
Dans tous les cas la cicatrisation a été possible par cette technique (Fig. 2 à 7). Il n'a pas été noté de fracture secondaire. Parallèlement il n'a pas été noté sur cette période de signe clinique d'ostéite même si radiologiquement des images de défect osseux sont visibles (Fig. 8). On ne note aucun séquestre radiologique résiduel.

Fig. 2 - Brûlure profonde du coude droit avec expansion de l'olécrâne un mois après la brûlure. Fig. 3 - Décortication précoce exposant en partie le tissu spongieux.
Fig. 2 - Brûlure profonde du coude droit avec expansion de l'olécrâne un mois après la brûlure. Fig. 3 - Décortication précoce exposant en partie le tissu spongieux.
Fig. 4 - Cicatrisation complète trois mois plus tard. Fig. 5 - Exposition osseuse des deux tibias chez un grand brûlé (85%) deux mois après les brûlures.
Fig. 4 - Cicatrisation complète trois mois plus tard. Fig. 5 - Exposition osseuse des deux tibias chez un grand brûlé (85%) deux mois après les brûlures.

 

Fig. 6 - Séquestrectomie au Centre de Rééducation sans intervention chirurgicale ni anesthésie. Fig. 6 - Séquestrectomie au Centre de Rééducation sans intervention chirurgicale ni anesthésie.

 

Discussion

Les inconvénients de la technique
Cette technique est impossible à realiser lorsqu'il existe une solution de continuité osseuse par fracture, ou par nécrose des deux corticales. Elle est déconseillée s'il existe des décollements en raison du risque infectieux d'ostéite ou d'ostéo-arthrite. Il est prudent de renoncer à cette technique lorsqu'il existe un traumatisme des parties molles associées. En effet c'est la bonne trophicité osseuse due à la vascularisation du complexe ostéo-fascio-musculaire qui peut éviter le risque septique.
La longueur du traitement et la surveillance médicale régulière à ce traitement est un inconvénient lorsque la couverture cutanée doit être rapide.

Les avantages

L'avantage majeur de ce procédé est sa simplicité et sa faible morbidité en particulier lorsqu'on la compare aux techniques par lambeaux sur le plan fonctionnel lorsqu'il est nécessaire de réaliser de vastes lambeaux voire des associations de lambeaux. La rançon esthétique est plus faible en raison d'absence de zone donneuse du lambeau et la mortalité et la morbidité générale appareil très faible rendant la décortication osseuse des os longs très facilement utilisable chez les sujets âgés.

Les indications

Il y a deux indications apparemment majeures chez le brulè:

  • Chez le grand brûlé les avantages sont appréciables et les inconvénients limités car il nécéssite souvent une surveillance longue en centre de rééducation. Il existe peu ou pas de décollement périosseux, rarement des fractures associées, et des interventions itératives sont peu souhaitables à la sortie de la phase aiguë.
  • Chez le sujet âgé les avantages sont certains lorsque l'exposition osseuse ou la nécrose osseuse est limitée en surface et ce d'autant que ces sujets peuvent bénéficier d'une amélioration de leurs différents handicaps lors d'un séjour en centre de rééducation.
Fig. 7 - Cicatrisation complète centripète chez un grand brûlé hospitaiisé un an en Centre de Rééducation. Fig. 8 - Image radiologique séquellaire d'une décortication progressive par perforation.
Fig. 7 - Cicatrisation complète centripète chez un grand brûlé hospitaiisé un an en Centre de Rééducation. Fig. 8 - Image radiologique séquellaire d'une décortication progressive par perforation.

Conclusion

S'il est important de maîtriser la technique de reconstruction chez le brûlé, la prudence nécessite parfois de s'abstenir de réaliser des lambeaux, ce qui ne dispense en aucun cas d'une surveillance soigneuse et de soins réguliers et prolongés dans le but de réaliser une prise en charge globale du brûlé par une équipe de brûlologues, qu'ils soient chirurgiens, anesthésistes, réanimateurs ou rééducateurs.

SUMMARY. Decortication of the long bones in the treatment of deep burns has proved over the years to be a useful technique in severely burned patients admitted to our Rehabilitation Centre and in elderly patients. The technical modalities are variable but close medical monitoring is necessary. Twelve cases were observed between 1987 and 1992. The advantages and disadvantages are described, and detailed considerations are made.


BIBLIOGRAPHIE

  1. Costagliola M., Rouge D.: Chirurgie réparatrice des membres inférieurs pour lambeaux homolatéraux. In: Rapport de chirurgie réparatrice et esthétique des membres inférieurs en dehors des malformations. XXXIème Congrès National de la Société Française de . Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique, octobre 1986.
  2. Rougé D., Chavoin J.P., Laffitte F., Micheau Ph., Costagliola M.,Laguerre J., Conil J.M., Brouchet A.: Lambeaux d'apport vasculaire dans les brûlures profondes des membres. Vllème Congrès de la Société Française d'Etude et de Traitement des Brûlures, Hyères, 25-27 septembre 1986.
  3. Tubiana R., Baux S.: "Brûlures de la face, brûlure du cou". Masson, Paris, 1976
  4. Rougé D., Lafitte F., Chavoin J.P., Vachaud M., Costagliola M.: Carbonisation étendue: excision au laser C02- lVème Congrès de la Société Française des Laser Médicaux. Baqueira (Espagne), 4-8 février 1985.

THE THIRD ASIA-PACIFIC CONFERENCE ON EMERGENCY AND DISASTER MEDICINE
will be held from 15 to 19 October 1996
in Ball, Indonesia

Topics
Emergency Medicine
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