<% vol = 2 number = 1 prevlink = 22 nextlink = 34 titolo = "LA BACTÉRIÉMIE EST-ELLE UN FACTEUR D'AGGRAVATION DU PRONOSTIC DU BRÛLÉ" data_pubblicazione = "Juin 2001" header titolo %>

GRIFFE O., CAPTIER G., GARTNER R., BRABET M., BARO B., OTMAN S., SELLOUMI D. l.


RÉSUMÉ.

Cette étude a pour objet de déterminer si, chez le patient brûlé présentant un sepsis, la présence d'une bactériémie, est un facteur d'aggravation du pronostic vital.Sur les 949 patients de l'étude, hospitalisés pour le traitement de brûlures, 129 ont présenté un sepsis.Trente et un p. cent des brûlés présentant un sepsis ont présenté une bactériémie dont la survenue est liée à l'étendue des brûlures. La constatation d'une bactériémie, contrairement à une opinion répandue, ne constitue pas un facteur de gravité du pronostic du sepsis dans la mesure où elle n'augmente pas la mortalité des patients, bien qu'elle entraîne une augmentation sensible de la durée d'hospitalisation.Elle doit être considérée davantage comme un élément de diagnostic que de pronostic.Il en est de même pour les bactériémies dues au bacille pyocyanique pour lesquelles la mortalité est comparable à celles dues à d'autres germes notamment à Gram +.


Mots clefs : infection -pronostic - bactériemie


But de l'étude

L'un des objectifs du traitement du brûlé est la prévention et le traitement de l'infection qui est classiquement considérée comme l'une des causes principales de mortalité.

Des progrès importants ont été réalisés depuis de nombreuses années dans ce domaine au niveau aussi bien du traitement local par l'utilisation de nouveaux topiques que du traitement général par l'utilisation rationnelle des antibiotiques et par l'amélioration des défenses de l'organisme notamment par l'apport de pharmaconutriments azotés et lipidiques.

Le but de cette étude est de déterminer la fréquence des sepsis, des bactériémies, la nature des germes responsables et si, dans les conditions actuelles de traitement, la présence de bactériémie, qui se définit par la présence dans le sang à un moment donné d'un germe affirmant une infection avec dissémination hématogène, est un facteur de gravité du sepsis.

Matériel et méthode

Il s'agit d'une étude rétrospective sur 5 ans portant sur la fréquence des sepsis et des bactériémies, la nature des germes responsables et sur leur incidence sur la mortalité et la durée d'hospitalisation des patients brûlés.

Les patients : l'étude porte sur 949 patients hospitalisés pour le traitement de brûlure des 1996 à 2000, dont l'âge moyen est de 33,49 (extrêmes 1-97) ans, le pourcentage moyen de surface corporelle brûlée de 12,57 (extrêmes 1-98), la sex-ratio de 0,65 et la mortalité de 5,2%. Cent vingt neuf de ces patients ont fait l'objet d'hémocultures devant un sepsis. Le sepsis chez le brûlé correspond le plus souvent à la prolifération des germes au niveau des brûlures et à leur diffusion aux tissus vivants sous-jacents pouvant être responsable de bactériémie et se manifestant par une tachycardie, une tachypnée, une hyperthermie, exceptionnellement une hypothermie et un état de prostration, associés à des signes locaux infectieux et inflammatoires. L'origine de l'infection peut également être digestive par translocation bactérienne, respiratoire et plus rarement urinaire, biliaire et ORL. La fréquence de décès des patients présentant une ou plusieurs hémocultures positives est comparée à celle d'un groupe témoin de patients de surface brûlée comparable avec hémocultures négatives. Le groupe témoin est constitué en prenant de façon aléatoire parmi les patients avec hémocultures négatives et pour chaque patient avec hémocultures positives, un patient dont la surface de brûlures profondes (2ième degré profond + 3ième degré) est proche de celui du patient présentant des hémocultures positives. Chaque patient du groupe témoin n'est sélectionné qu'une seule fois.

Indice de gravité (IG) : il est utilisé pour comparer la gravité des patients en fonction de l'âge et de la surface brûlée qui sont les deux facteurs essentiels du pronostic du brûlé. Il est calculé â partir de l'équation IG = e(-6,8256 + (0.0510*AGE) + (0.0835*°%SBp» (IG-

probabilité de décès, %SBP= % de surface de brûlures profondes) qui résulte de l'analyse des facteurs pronostiques du brûlé par la méthode de régression logistique [1]. Les coefficients affectés aux variables ont été calculés â partir des 949 patients de l'étude.

Statistiques : les données qualitatives sont comparées par le test du Khi2 et les données quantitatives par l'analyse de variance, le test de Student et le test non paramétrique de Mann-Whitney. Les différences observées sont considérées comme significatives lorsque le coefficient de probabilité p est égal ou inférieur à 0,5.

apport de fréquence ~s germes celles de se définit tnné d'un ~mination psls.

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Résultats

Fréquence des bactériémies : Cent vingt neuf patients sur les 949 hospitalisés ont fait l'objet d'un ou plusieurs trains d'hémocultures. Sur 1079 hémocultures effectuées, 322 ont été positives. Sur les 129 patients, 40 ont présenté une ou plusieurs hémocultures positives et 89 aucune hémoculture positive. L'analyse des facteurs de gravité (âge, % de surface brûlée totale, %, de surface de brûlures profondes, IG) montre des différences significatives entre les patients qui n'ont pas eu d'hémoculture, les patients qui ont des hémocultures négatives et les patients qui ont eu des hémocultures positives (tab. 1). La présence de sepsis et de bactériémie apparaît étroitement liée à l'étendue de la brûlure. La surface moyenne brûlée est de 9,59 p. cent chez les patients ne présentant pas de sepsis, de 28,14 p. cent chez ceux présentant un sepsis avec hémocultures négatives et de 37,35 p. cent chez ceux présentant un sepsis avec hémocultures positives. Ces différences sont significatives.


<% createTable "Table I","Comparaison des facteurs de gravité entre les différents groupes de patient",";;Nombre; Age moyen ;% moyen de SBT (*- ;% moyen de SBP (± ;Indice de gravité;;;;;;;;@;Pas d'hémoculture (1);820;32,5(±0,80);9,59(±0,44);6,60(±0,40);0,039(±0,0043);;;;;;;;@;Hémoculture (2);89;40,4(±2,18);28,94(±2,13);23,72(±2,05);0,124,(±0,0204);;;;;;;;@;Hémoculture (3);40;38,67(±2,50);37,35,(±3,14);33,25,(±3,19);0,180,(±0,0,31);;;;;;;;@;p (ANOVA);;=0,004;<0,001;<0,001;<0,001;;;;;;;;@;p (Student) 1-2;;=0,003;<0,001;<0,001;<0,001;;;;;;;;@;p (Student) 2-3;;=0,0709;=0,029;=0,011;=0,135;;;;","",4,400,true %>

Germes isolés : En ne retenant que les germes d'espèces différentes isolés chez un même patient, 72 germes ont été isolés soit en moyenne 1,8 germes différents par patient. Leur répartition montre une prédominance du staphylocoque et du bacille pyocyanique (tab. II)

<% createTable "Table II","nature et répartition des germes isolés dans les hémocultures","@;Germes isolés; Fréquence en %@;staphylocoques ;48,61%@;Pseudomonas;26,38%@;Streptocoques;9,72%@;entérocoques ;4,17%@;levures;2,78%@;autres ;8,33%","",4,300,true %>

Incidence des bactériémies sur la mortalité

La mortalité du groupe de patients avec hémocultures positives est comparée à celle du groupe témoin de patients de même effectif et de gravité comparable (tab. III) extrait des patients avec hémocultures négatives. On n'observe pas de différence significative de mortalité entre les deux groupes (p=0,585) (tab. IV).

<% createTable "Table III","caractéristique des groupes de patient 1 et 2",";;Groupe1 Hémoculture +;Groupe 2 Hémoculture-;Statistique@;Nombre de patients ;40;40;@;Aie moyen (±SEN1) ;40.10 ('- 3,13) ;38,67 (+ 2,50) ;p=0,723 (Student)@;moyen de SBT (± SEM) ;37,42 (t 3,01) ;37,35 (+ 3,14); p=0,986 (Student)@;moyen de SBP (±SEM) ;32,67 (+ 3,04); 33,25 (± 3,13) ;p=0,895 (Student)@;IC moyen (+SEM); 0,188 (+0,035) ;0,179 (t 0,030) ;p=0,852 (Student) p=0,976 (Manu-Whitney)","",4,400,true %> <% createTable "Table IV","Comparaison de la fréquence des décès entre les groupes hémoculture + et témoins",";;§1,3§Evolution;@;;;Survie; Décès@;Groupe témoin; Effectif ;33;7@;;% dans-groupe;82.5%;17,50%@;Groupe hémoeulture+; Effectif ;30;10@;;% dans-groupe 2;75%;25%@;Total; Effectif ;63;17@;;% dans-groupe 1- 2;78,80%;21,30%@;Khi2;;;p= 0.585;","",4,300,true %>

Incidence des bactériémies sur la dupée d'hospitalisation

La durée moyenne d'hospitalisation des patients ne présentant pas de bactériémie est de 37,50 (SEM = 3,63) jours versus 55,17 (SEM = 4,94) jours pour les patients présentant une bactériémie, ce qui représente une augmentation de 47 p. cent de la durée de séjour, qui est hautement significative (p = 0,005) (tab.V).

<% createTable "Table V","Durée de séjour en fonction de la présence ou non de bactériémie",";§1,2§Ensemble des patients§1,2§Patients survivants;@;;sans bactériéme (Groupe 1);avec bactériéme (Groupe 2);sans bactériéme (Groupe 1);avec bactériéme (Groupe 2)@;Durée d'hospitalisation (jours±SEM);37,50(±3,63);55,17(±4,94);42,09(±3,83);58,48(±4,62)@;Test de Student;p=0,005;;p=0,008;","",4,300,true %>

Incidence de la nature des germes isolés

Les septicémies dues au bacille pyocyanique sont considérées comme étant particulièrement graves. Une infection par le bacille pyocyanique multiplierait par deux le risque habituel de mortalité [3]. Sur la population étudiée, 16 patients sur 40 ont présenté des bactériémies dues au bacille pyocyanique. La fréquence des décès chez les patients présentant une bactériémie due au bacille pyocyanique et chez les patients présentant une bactériémie due à d'autres germes se révèle identique (rab. VI).

<% createTable "Table VI","Fréquence des décès en fonction de la nature des germes isolés dans les hémocultures",";;§1,2§Evolution;;@;;;Survie ;décès ;Total@;PyTocyanique ;Effectif;12;4;16@;;%;75,00%;25,00%;100%@;Autres germes;Effectif;18;6;24@;;%;75,00%;25,00%;100%@;Total;Effectif;30;10;40@;;%;75,00%;25,00%;100%@;Khi;;p = 1,00;;","",4,300,true %>

Les patients qui présentent une bactériémie à bacille pyocyanique ont des valeurs de surface brûlée, d'indice de gravité et de durée d'hospitalisation supérieures à celles des patients présentant une bactériémie à d'autres germes (tab. VII). Ces différences sont à la limite de la signification pour la surface brûlée totale (p=0,06) et significatives pour l'indice de gravité (p=0,038) et la durée d'hospitalisation (p<0,001). Les bactériémies à bacille pyocyanique sont donc observées chez les brûlés les plus graves ; ce qui permet d'expliquer une durée d'hospitalisation plus longue. <% createTable "Table VII","caractéristique des groupes de patient avec hémoculture à Pseudomonas aeruginosa et germes autres",";;Groupe Hémoc + à Pseud. Aerug.;Groupe Hémoc + à Pseud. Aerug.;Statistique@;Nombre de patient o;16;34;@;Age moyen (±SEM);40,69(±3,52);37,33,(±3,48);p=0,519(Student)@;% moyen de SBT (±SEM);44,50(±5,38);32,58,(±3,57);p=0,062(Student)@;% moyen de SBP (±SEM);39,38,(±20,44);29,17,(±3,80);p=0,111(Student)@;Durée hospitalisation (jours);82,50,(±6,38);40,91,(±4,46);p<0,001(student) p<0,001 (Mann-Whitney)@;IG moyen (±SEM);0,257,(±0,059);0,127(±0,029);p<0,038(student) p<0,045 (Mann-Whitney)","",4,300,true %>

Discussion

La fréquence des sepsis et des bactériémies est relativement faible. Cent vingt neuf des 949 patients de l'étude ont présenté un sepsis et ont fait l'objet d'hémocultures qui se sont révélées positives chez 40 d'entre eux, ce qui représente seulement 4,21 p. cent de l'ensemble des patients. Sur 1079 hémocultures réalisées chez ces patients seulement 322 se sont révélées positives. Une bactériémie est retrouvée chez 31 p. cent des patients présentant un sepsis ; ce qui correspond à la fréquence généralement observée qui se situe entre 30 et 60 p. cent. Les hémocultures peuvent être négatives soit parce qu'il n'y a réellement pas de bactérie dans le sang soit parce que les bactéries sont altérées par le traitement antibiotique [2].

La survenue de sepsis et de bactériémie apparaît liée à la gravité des brûlures. Le pourcentage moyen de surface brûlée est de 9,59 p. cent chez les patients qui n'ont pas eu d'hémoculture, de 28,94 p. cent chez les patients qui ont eu des hémocultures négatives et de 37,35 p. cent chez les patients qui ont eu des hémocultures positives. Ces résultats confirment ceux de Sasaki [4] qui constate que les patients qui ont des hémocultures positives sont brûlés en moyenne sur 46,6 p. cent de le surface corporelle alors que ceux qui ont des hémocultures négatives ne le sont que sur 25,5 p. cent de la surface corporelle en moyenne. L'âge moyen des patients qui ont eu des hémocultures positives est comparable à celui des patients qui ont eu des hémocultures négatives. L'âge, qui est avec la surface brûlée un des deux facteurs principaux du pronostic du brûlé, n'apparaît pas influencer la survenue de bactériémies.

La fréquence des décès des patients présentant un sepsis avec des hémocultures positives est comparable à celle des patients de même gravité mais présentant des hémocultures négatives (p= 0,585). Ce résultat, bien que contraire à l'opinion très répandue qui estime que la diffusion hématogène de l'infection constitue un facteur de gravité, confirme ceux de plusieurs auteurs [5,6,7,8]. De même, la distinction entre bactériémie à Pseudomonas aeruginosa entachée d'un mauvais pronostic et celle dues à d'autres germes notamment à Gram positif semble ne pas devoir persister dans la mesure où la mortalité est comparable et que la durée d'hospitalisation élevée est expliquée par une gravité plus importante des patients. La bactériémie doit être considérée plus comme un élément de diagnostic que de pronostic bien qu'elle entraîne une augmentation significative (p=0,005) de 47,12 p. cent de la durée d'hospitalisation.

Conclusion

Trente et un p. cent des brûlés présentant un sepsis ont présenté une bactériémie dont la survenue est étroitement liée à l'étendue des brûlures. La constatation d'une bactériémie, contrairement à une opinion répandue, ne constitue pas un facteur de gravité du sepsis dans la mesure où elle n'augmente pas la mortalité des patients présentant un sepsis, bien qu'elle entraîne une augmentation sensible de la durée d'hospitalisation. Elle doit être considérée davantage comme un élément de diagnostic que de pronostic. Il en est de même pour les bactériémies dues au bacille pyocyanique pour lesquelles la mortalité est comparable à celles dues à d'autres germes notamment à Gram +.

Summary

The aim of this study is to determine if, in sepsis of a burnt patient, bacteriemia worsen the vital prognostic. On 949 burned patients, treated in Montpellier center, 129 sepsis were observed, 31% of the septic patients have a bacteremia, the frequency arises with the T.B.S.A. The observation of a bacteremia, in spite of a wide-spread opinion, does not constitute an aggravation factor of the prognostic of the sepsis and partieularily does not increase the mortality of the patients. The length of hospitalization is inereased. Bacteremia must bc considered more as an element of diagnosis than prognostic. fi is the saine whatever is the germ, mortality is identical for pyoncyanic and Gram +.


Références

  1. Griffe O, Gartner R, Capfer G, Brabet M, Baro B, D Selloumi, Otman S. Evaluation des facteurs pronostiques chez le patient brûlé. Ann Chir Plast, 2001; (accepté et à paraître)
  2. Mason AD, Mac Manus AT, Pruitt BA. Association of burn mortality .and. bacteriemia. A 25 year review. Arch Surg, 1986 ; 121 : 1027-1081.
  3. Heggers J, Linares HA, Edgar P, Villarreal C, Hemdon DN. Treatment of infections in buns in : Herndon, Total Burn Care.l vol. Saunders, London, 1996, p 98-135.
  4. Sasaki T M,Welch GW Herndon TN. Burn wound manipulation inducedbacteremia. J Trauma 1979 ; 19(1) : 46-48.
  5. Brun-Buisson C. Etat infectieux graves : définitions, épidémiologie, pronostic. In : Carlet J, Martin CL, Offenstadt G, Etats infectieux graves, perspectives et thérapeutiques. 1 vol Masson, Paris, 1995, p 3-16.
  6. Brun-Buisson C, Doyon F, Carlet J. Incidence, risk factors, and outcome of severe sepsis and septic shock in adults. A multicenter prospective study in intensive care units. JAMA 1995 ; 274 : 968-974.
  7. Knaus WA, Sun X, Nystrom PO, Wagner DP. Evaluation of definitions of sepsis. Chest 1992 ; 101 : 1656-1662
  8. Pittet D, Thievent B, Wenzel RP, Li N, Gurman G, Suter PM. Importance of pre-existing comorbides for prognosis of septicemia in critically ill patients Intensive Care Med 1993 ; 19 :265-272.